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RichesFlores Research : "Un mal pour un bien. Vraiment ?"
information fournie par Partenaire 23/03/2020 à 15:25

TRIBUNE LIBRE. L'Humeur du vendredi de Véronique Riches-Flores, fondatrice et Présidente de RF Research.

L'idée a germé dans nos esprits dès les débuts de l'épidémie de coronavirus : cette crise sanitaire inédite ne serait pas sans lendemains. Non pas qu'elle aura dévoilé la fragilité d'un monde que l'on croyait aseptisé qui nécessiterait une remise à plat des pratiques de prévention médicale en même temps qu'une plus grande transparence des systèmes santé et une meilleure préparation à des scénarii d'épidémie de grande ampleur.

Non, c'est sur un autre plan que le choc provoqué par cette pandémie est le plus largement attendu : en l'occurrence dans sa capacité à accélérer le détricotage d'une mondialisation effrénée, aux proportions devenues insoutenables pour la bonne marche économique mondiale, qui plus est, incompatible avec toute ambition climatique un tant soit peu significative. L'apparition du Covid-19 en Chine a levé le voile sur l'extrême dépendance du reste du monde à l'égard de ce qui est devenu son atelier. Rien de nouveau mais néanmoins une violente prise de conscience des risques associés à une situation de sujétion critique allant jusqu'à l'approvisionnement des cellules souches de nos médicaments les plus indispensables.

Alors on se prend à rêver que cette crise éveille les consciences, qu'elle permette d'effectuer ce grand pas en avant vers de nouveaux modes de consommation plus respectueux des besoins effectifs, de l'environnement et des équilibres économiques régionaux ; qu'elle rapproche les lieux de production de ceux de la consommation et redistribue plus équitablement les ressources en emploi ; que les images de la NASA d'un ciel pourri aux particules de dioxyde d'azote au-dessus du territoire chinois n'appartiennent plus qu'au passé. Une crise salvatrice en somme, un mal pour un bien. Mais, c'est à craindre, un rêve bien éloigné des lendemains que nous promet la crise en cours.

Le mal serait fait

De jour en jour l'épidémie de coronavirus provoque les mêmes effets : paralysie de la vie économique, de la production, des transports. Les consommateurs confinés s'arrêtent de consommer et ne s'en portent pas plus mal. Après tout, de quoi l'Humain a-t-il besoin de plus que d'un toit, de se sustenter et d'avoir accès aux commodités de base : énergie, eau potable, que les gouvernements de par le monde assurent tant bien que mal pour l'instant ? Coupé du monde, il ne l'est pas tant que ça d'ailleurs, au contraire de ce qu'aurait été la même situation dix ans auparavant. Depuis sont nés les réseaux sociaux et autres facilités autorisant le travail à distance, la lecture, les divertissements et la communication sans frontière.

Abasourdi et, à certains égards, anesthésié par ce que nous vivons chacun dans notre bulle, l'esprit gambade, propice à une prise de distance avec la réalité et, sans doute, à une plus grande aptitude à tout remettre à plat, à tout reconsidérer. Ne voilà pas que ces changements de notre «modèle de croissance» que nous pressentions nécessaires sans savoir comment s'y prendre pour ne pas ébranler nos systèmes, nos entreprises et nos ressources en emplois, nous sont, finalement imposés d'un jour à l'autre par ce cas de force majeure de la pandémie.

La chute des marchés dont la simple menace a fait déplacer des montagnes d'initiatives monétaires ces dernières années est toute aussi effective et, avec elle, l'éclatement des bulles nées du déversement inédit de liquidités depuis la crise de 2008 et dont nous redoutions tant les éclaboussur

Le plus dur serait donc quasiment fait : stopper la machine infernale, chose qui n'aurait jamais été envisageable autrement que dans des conditions de guerre. Dès lors se diffuse l'idée que tout est possible, que nous pourrions tout revoir. Le président E. Macron ne nous dit pas autre chose en conclusion de son discours du 12 mars :  « il nous faudra demain tirer les leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s'est engagé notre monde depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour, interroger les faiblesses de nos démocraties...

Ce que révèle cette pandémie, c'est qu'il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner notre cadre de vie au fond à d'autres est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle, construire plus encore que nous ne le faisons déjà une France, une Europe souveraine, une France et une Europe qui tiennent fermement leur destin en main. Les prochaines semaines et les prochains mois nécessiteront des décisions de rupture en ce sens. Je les assumerai. »

Dur réveil

Ces bonnes résolutions résisteront-elles à l'épreuve de la crise en cours ? On peut décemment en douter à en juger par les premières estimations aujourd'hui réalisables sur l'impact économique de l'épidémie.
Les rares indicateurs disponibles en provenance de Chine depuis le début du confinement nous ont donné

une idée du degré de paralysie subi par ce premier pays à y avoir eu recours :
- Chute de 80 % à 90 % des ventes automobiles, des transactions immobilières et du trafic de passagers au niveau national, ou encore de la consommation de charbon.
-  Retrait de 50 % minimum de la production de voitures, d'habillement, de ciment au cours des deux premiers mois de l'année par rapport à la moyenne des volumes produits les quatre années précédentes durant de cette même période de l'année, laquelle n'inclut pas le mois de mars probablement plus mauvais encore compte-tenu de l'intensification de l'épidémie fin-février-début mars.

La liste n'est pas exhaustive mais déjà suffisante pour prendre la mesure effective du choc chinois et de celui qui attend les autres économies plus récemment entrées en confinement.

Source: RicheFlores Research, Macrobond

Source: RicheFlores Research, Macrobond

Une crise des services avant tout

Au contraire des crises conjoncturelles classiques, voire même de celle de 2008, les services sont particulièrement impactés par l'épreuve du confinement. Pour la première fois de l'histoire moderne, c'est par ce canal que les effets les plus délétères de la paralysie de l'activité sont à attendre ; le commerce hors alimentaire, l'hôtellerie, la restauration, le tourisme, les loisirs, la culture, les services aux entreprises, auxquels il faut bien entendu ajouter les banques, les assurance, , les transports et la construction. Pas un secteur n'échappe aux conséquences des mesures restrictives de prévention sanitaire progressivement adoptées par une large majorité de pays à travers le monde et, dorénavant, quasiment dans l'ensemble de l'espace européen ; pas même la santé pour laquelle, sauf les services hospitaliers, l'activité est également très ralentie.
Une première idée de cette situation exceptionnelle nous est parvenue de Chine fin février avec la livraison des indices PMI du climat des affaires, lesquels, au-delà de décrire un choc industriel d'ores et déjà plus important qu'en 2008, nous signalent une situation extrême dans le reste de l'économie, sans commune mesure avec les lendemains de la faillite de Lehman Brothers.

PMI Chinois (CFLP) Source: RicheFlores Research, Macrobond

PMI Chinois (CFLP) Source: RicheFlores Research, Macrobond

L'enquête IFO du climat des affaires en Allemagne ne nous a pas dit autre chose hier, avec un des perspectives d'ores et déjà à leur plus bas niveau de décembre 2008 ; avant que ne soit prises les mesures de restriction de ces derniers jours.

IFO Servcies: Soldes d'opinions, en % - Source: RicheFlores Research, Macrobond

IFO Servcies: Soldes d'opinions, en % - Source: RicheFlores Research, Macrobond

On peut également soupçonner que l'envolée des inscriptions hebdomadaires au chômage aux États-Unis ait beaucoup à voir avec le coup d'arrêt porté par l'épidémie aux activités de services d'un nombre croissant d'États américains depuis deux semaines.

Inscriptions hebdomadaires au chômage aux Etats-unis - Source: RicheFlores Research, Macrobond

Inscriptions hebdomadaires au chômage aux Etats-unis - Source: RicheFlores Research, Macrobond

Que peut donner une crise d'une telle profondeur dans les secteurs qui concentrent l'essentiel des emplois, des PME et des professions indépendantes, lesquelles, on le sait, se sont multipliées sans précédent ces dernières années ?

Dans leur grande majorité, les PME de services n'ont pas la capacité financière à faire face à une interruption de leur activité de plusieurs semaines. Les déperditions d'emplois et les faillites ont donc tout lieu d'être considérables et la situation risque, à bien des égards, d'être plus difficilement récupérable que dans l'industrie dans laquelle, malgré les dégâts envisageables, il faudra restocker, rattraper une partie des commandes non honorées et faire face au surcroît de demande restée en attente pour cause de confinement. L'industrie pourra selon toute vraisemblance rebondir, au moins temporairement, plus facilement que ne renaîtront les entreprises de services qui auront été avalées par la crise.

Un mois d'arrêt de l'activité quasi mondiale, c'est 1/12ème d'une année en moins, ou 8,3%

Les lendemains du confinement risquent à l'évidence de révéler une situation économique d'une rare violence, à laquelle les conditions en présence, sauf celles des marchés financiers, semblent mal nous préparer.
Impossible de prédire de combien sera ce choc mais nous pouvons d'ores et déjà nous livrer à quelques estimations grossières et comprendre à quel point il sera, selon toute vraisemblance totalement inédit.
Un mois sur douze que compte une année, c'est en effet 8,3 % du PIB potentiellement entamés à hauteur de 70 % à 80 %, soit un choc de 6 % en équivalent annuel.
Rares semblent les secteurs à même d'échapper à une déperdition de moins de 60 % de leur activité, en effet. Selon nos appréciations, qui n'ont à ce stade rien de scientifique ni de vérifiable, seuls l'agriculture et l'administration et services publics pourraient s'en sortir à moindre coût : soit, si notre appréciation se vérifie, un cinquième environ de l'activité économique.

Impact possible du confinement sur les secteurs du PIB de l'UEM - Source: RicheFlores Research, Macrobond

Impact possible du confinement sur les secteurs du PIB de l'UEM - Source: RicheFlores Research, Macrobond

À supposer que la période de confinement ne dure pas plus qu'un mois, il faudra pour remettre l'activité sur les rails plusieurs semaines avant de retrouver une activité « normale » ainsi qu'en témoigne l'expérience chinoise. En tout et pour tout nous parlons donc au bas mot d'un choc trimestriel de 20 % à 30 % sur le PIB du deuxième trimestre, en France, en Allemagne, comme pour l'ensemble de la zone euro ; du jamais vu ni même approché.
On peut naturellement s'interroger sur ce qu'il restera dans de telles conditions des capacités de rattrapage conjoncturel d'un choc qui, simultanément, frappera la plupart des pays de la planète.

Gueule de bois

Assurément, quelles que soient les mesures d'accompagnement pour limiter la casse, les lendemains du confinement seront ceux d'une gueule de bois aux conséquences que nous peinons à imaginer et qu'il faudra tant bien que mal panser dans les plus brefs délais. Mais avec quels moyens ?
Face à l'urgence sanitaire et aux risques encourus, les gouvernements du monde entier prennent des dispositions historiques dont le coût ajouté à celui des effets de l'arrêt de l'activité, a tout lieu d'excéder celui de la crise de 2008. À l'époque l'augmentation des dettes publiques avait oscillé entre 10 % et 38 % du PIB en deux ans, la fourchette haute étant illustrée par l'Irlande qui, on s'en souvient, avait nationalisé son système bancaire. Or, c'est déjà annoncé, les nationalisations seront sans doute indispensables pour sauver un certain nombre d'entreprises.

Quelles peuvent être les conséquences sociales, économiques, financières et politiques d'une telle situation et les crises qui risquent de s'ensuivre ?

Il faudra, c'est peu de le dire, une volonté de fer pour que dans de telles conditions d'urgence immédiate les politiques de long terme puissent trouver leur place.

Variation des dettes publiques entre 2007 et 2009, en % du PIB - Source: RicheFlores Research, Macrobond

Variation des dettes publiques entre 2007 et 2009, en % du PIB - Source: RicheFlores Research, Macrobond


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4 commentaires

  • 23 mars 17:05

    Les dettes vont exploser... Adieu nos économies / assurances vies ! Pourvu que la démocratie survive...


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