(NEWSManagers.com) - Les agences de notation feraient preuve d'une sévérité accrue dans
leur appréciation des dettes d'entreprises, selon une étude présentée
dans la dernière livraison de La lettre Vernimmen.net (n° 133, août
2015). L'étude montre que les agences ont noté de plus en plus
sévèrement les entreprises entre 1985 et 2009, et que les entreprises et
les marchés en ont tenu compte. L' essentiel de l' étude (1) porte sur
les notes attribuées par Standard & Poor' s, mais la corrélation avec
les notes de Moody' s et Fitch est énorme (94%). La grille de note de
cette agence est constituée de 21 niveaux, de AAA à C. Entre 1985 et
2009, le nombre de bonnes notes a diminué et le nombre de mauvaises
augmenté. Dans le même temps, les taux de défaut d' entreprise à note
équivalente ont diminué.
Ainsi, la cause du phénomène n' est sans doute pas à chercher dans
des conditions macroéconomiques plus difficiles mais plutôt dans le mode
de notation des agences. Surtout, des entreprises de caractéristiques équivalentes (niveaux de dette court terme et long terme, niveau de cash,
profitabilité, taille, tangibilité des actifs, etc.) sont notées plus
sévèrement. La différence est notable, la note baisse en moyenne de 3
crans ! Une entreprise se situant dans la moyenne de celles qui
obtenaient AAA en 1985 n' obtiendrait plus que AA- en 2009.
Dans
la suite de l' article, les auteurs mesurent la " sévérité " par l' écart
entre la note obtenue et la note théorique si le modèle de 1985 avait
été maintenu. Cela leur permet de mesurer empiriquement les conséquences
de ce conservatisme sur le comportement des entreprises d' une part, et
sur le marché de la dette d' autre part. Ils montrent qu' une entreprise
notée un cran plus sévèrement émet substantiellement moins de dette. La
différence correspond à 0,2 % du total des actifs (pour une émission
moyenne de 2,6 %). De même, le montant des acquisitions diminue et le
niveau de cash détenu augmente.
Concernant les marchés du crédit, sans surprise la note a un
impact sur le prix. A un cran de notation de perdu correspond une
augmentation de la marge de 74 points de base (pb). Plus intéressant, à
note équivalente, le spread est plus faible (de 9,5 pb) pour les
entreprises qui sont notées sévèrement (et auraient donc obtenu une
meilleure note en 1985). Autrement dit, les marchés compensent
légèrement les effets de cette plus grande sévérité.
(1) R.P.BAGHAI, H.SERVAES et A.TAMAYO, Have rating agencies become
more conservative? Implications for capital structure and debt pricing,
Journal of Finance, vol. 69, n° 5, pages 1961 à 2005).
Jean-François Tardiveau
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