par Marc Joanny PARIS, 10 avril (Reuters) - C'est un peu le monde à l'envers. La production manufacturière en France a poursuivi son rebond pour le troisième mois consécutif en février tandis qu'elle a continué à se contracter, bien qu'à un rythme ralenti, en Allemagne. La production manufacturière française a augmenté de 1,1% au mois de février par rapport au mois précédent après une hausse de 0,7% en janvier. Dans le même temps, la production manufacturière allemande a reculé de 0,2% en février après -0,5% en janvier et +1,0% en décembre. Elle avait diminué cinq fois pendant six mois jusqu'à novembre inclus. Cette divergence des secteurs manufacturiers de part et d'autre du Rhin tranche avec l'idée solidement ancrée d'une industrie allemande performante et exportatrice à l'origine de 25% de la richesse nationale produite par le pays et d'une industrie française qui se réduit comme peau de chagrin, tout juste bonne à perdre des parts de marché et qui pèse à peine plus de 10% dans le produit intérieur brut. La dynamique des deux secteurs manufacturiers au cours des vingt dernières années est d'ailleurs sans appel : conquérante en Allemagne où les effets de la grande crise financière ont vite été effacé ; atone en France où le choc de 2008-2009 a marqué un nouveau décrochage. Mais la tendance semble s'inverser. Bien sûr, le passage à vide de l'industrie allemande pourrait trouver son origine dans les perturbations de la production automobile, qui pèse environ 20% du secteur, à la suite des problèmes liés à la nouvelle procédure mondiale d'homologation des véhicules ou encore par des contraintes de production dans les secteurs pharmaceutique et chimique. Pour les économistes de Bank of America Merrill Lynch, cette explication par des facteurs transitoires est un peu courte pour justifier un écart dans la dynamique des secteurs manufacturiers allemand et français qui est désormais de l'ordre d'un point de pourcentage. Le fait que l'indice des directeurs d'achat du secteur manufacturier (PMI) allemand ait continué à se dégrader au premier trimestre 2019 tandis que le français s'est montré plus résistant suggère également que les motifs de la divergence pourraient être plus structurels, estiment-ils. PAS UNE SI BONNE NOUVELLE Pour eux, la "force" historique de l'Allemagne, à savoir l'exposition de son industrie à l'économie américaine en ralentissement, à la croissance chinoise qui peine à se stabiliser et au cycle mondial de l'investissement en panne fait aujourd'hui sa faiblesse. A l'inverse la "faiblesse" de la France, à savoir sa plus forte exposition aux économies européennes et la spécialisation de son industrie sur les biens de consommation, fait aujourd'hui sa force. "Cette performance relative peut durer et s'accroître si la croissance de la Chine ne fait que se stabiliser ou s'améliore grâce aux dépenses de consommation plutôt que l'investissement" avec le repositionnement du modèle de croissance chinoise sur la demande interne au détriment de l'export, préviennent-ils. Alexandre Mirlicourtois, économiste à l'institut Xerfi pose le même diagnostic sur l'Allemagne: "la spécialisation internationale de l'Allemagne dans les biens d'équipement et l'automobile notamment adaptée aux pays émergents est devenue un handicap", explique-t-il. "Le modèle 'mercantiliste' et ultra-excédentaire allemand qui tire sa force de son industrie ultra-compétitive, bat de l'aile et la thèse de l'accident conjoncturel ne tient plus" poursuit-il, soulignant au passage que l'Allemagne doit faire face à la montée en gamme des pays émergents. Il note aussi que son industrie automobile est confrontée au défi technologique de la révolution électrique alors que "parmi les 20 modèles électriques les plus vendus dans le monde, aucun n'est allemand." "Si l'on ajoute à cela une société allemande de plus en plus fragmentée, le manque de bras, que le filon de l'immigration ne comble plus, le manque d'infrastructures, la fragilité du système bancaire, et maintenant la flambée des prix de l'immobilier qui grève le budget des ménages, l'on comprend mieux que le piège semble se resserrer sur l'économie allemande." Les difficultés structurelles du secteur manufacturier allemand et l'embellie que connaît son équivalent français sont toutefois loin d'être une bonne nouvelle pour la zone euro, préviennent les économistes de Bank of America Merrill Lynch. "La taille du secteur manufacturier allemand est presque trois fois celle du français, cela conduit à un mix de croissance sous-optimal en Europe." Sources : *Germany vs France : Don't let noise trump structure. Global Economic Weekly. Bank of america Merrill Lynch. 5 avril 2019. *Allemagne: un lueur d'espoir. EcoWeek. 5 avril. Allemagne, la stabilisation des commandes pourrait annoncer un début de reprise. Graphique de la semaine. 3 avril. BNP Paribas *L'Allemagne décroche quand le Royaume-Uni s'accroche malgré le Brexit! Xerfi. 20 mars 2019 <^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^ Indices de la production manufacturière en France et en Allemagne https://tmsnrt.rs/2Ib0hhY France-Allemagne : Dynamique relative de la croissance manufacturière https://tmsnrt.rs/2DhSX0j France-Allemagne: PMI manufacturiers https://tmsnrt.rs/2Ib0C4e ^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^> (édité par Blandine Hénault)
GRAPHES-Industrie: l'Allemagne à la peine, la France qui rit, inédit
information fournie par Reuters 10/04/2019 à 11:00
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