Septième jour de combats meurtriers en Syrie malgré l'annonce d'un cessez-le-feu information fournie par AFP 19/07/2025 à 16:49
Des combats ont opposé samedi des tribus et bédouins sunnites aux combattants druzes dans la ville syrienne de Soueida, malgré l'annonce d'un cessez-le-feu, au septième jour de violences intercommunautaires ayant fait 940 morts selon une ONG.
Le pouvoir syrien a annoncé plus tôt le début du déploiement de ses forces dans la province méridionale à majorité druze, appelant "toutes les parties à respecter" la trêve qu'il a proclamée.
Les Etats-Unis ont eux aussi annoncé vendredi soir un accord de cessez-le-feu entre la Syrie et Israël, en appelant "les druzes, les bédouins et les sunnites à déposer les armes".
Dans un quartier de la ville, des combattants tribaux, certains au visage masqué, tirent avec des armes automatiques en direction de leurs adversaires, selon des images de l'AFP. Des colonnes de fumée s'élèvent au-dessus du chef-lieu de la province éponyme.
Plus loin, des membres de tribus tirent en l'air, d'autres circulent à bord de camionnettes ou de scooters. A côté, un véhicule endommagé et un immeuble noirci par les flammes témoignent des violences.
"Nous sommes venus ici et nous allons les massacrer tous dans leurs maisons", a lancé en référence aux druzes l'un des combattants tribaux, se faisant appeler Abou Jassem.
- "Dialogue" -
Les affrontements entre tribus et bédouins sunnites d'un côté, et combattants de la minorité druze de l'autre, se sont poursuivis dans l'ouest de la ville et ses abords, selon des correspondants de l'AFP sur place.
Ahmad al-Chareh, président intérimaire arrivé au pouvoir après avoir renversé le président Bachar al-Assad en décembre, a réaffirmé son engagement à protéger les minorités et salué "le rôle important joué par les Etats-Unis, qui ont confirmé leur soutien à la Syrie".
Son ministère de l'Intérieur a annoncé dans le même temps "le début du déploiement des forces de sécurité dans la province de Soueida (...) dans le but de protéger les civils et de mettre un terme au chaos".
Israël, qui affirme vouloir défendre les druzes, une minorité ésotérique issue d'une branche de l'islam, était jusque-là opposé à la présence de telles forces dans cette région.
Le pouvoir syrien, disant vouloir rétablir l'ordre, avait déjà déployé ses forces mardi à Soueida, jusque-là contrôlée par des combattants druzes.
Il les avait toutefois retirées, expliquant vouloir éviter une "guerre ouverte" avec Israël, qui avait bombardé plusieurs cibles du pouvoir à Damas et menacé d'intensifier ses frappes si les autorités ne retiraient pas leurs forces de Soueida.
L'Union européenne a salué le cessez-le-feu annoncé par Washington, estimant que le moment était "maintenant au dialogue".
Sur X, le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, a jugé qu'en Syrie, "il est très dangereux d'appartenir à une minorité, qu'il s'agisse des kurdes, des druzes, des alaouites ou des chrétiens".
L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), des témoins et des groupes druzes avaient accusé les forces gouvernementales déployées à Soueida d'avoir combattu aux côtés des bédouins et commis des exactions.
Depuis le 13 juillet, les violences ont fait 940 morts dans la province, dont 588 Druzes (326 combattants et 262 civils), 312 membres des forces gouvernementales et 21 Bédouins sunnites, d'après l'OSDH.
- Ni eau, ni électricité -
Près de 87.000 personnes ont été déplacées, d'après l'Organisation internationale pour les migrations.
Vendredi, des combattants de tribus ont afflué de régions syriennes vers Soueida pour aider les bédouins. Un chef tribal, Anas al-Enad, a affirmé à l'AFP être venu avec ses hommes de Hama (centre) "en réponse aux appels à l'aide des bédouins".
Selon le médecin Omar Obeid de l'hôpital gouvernemental de Soueida, le seul de la ville encore opérationnel, l'établissement a accueilli entre lundi et vendredi "plus de 400 corps".
"Ce n'est plus un hôpital, c'est une fosse commune", a déclaré un autre membre du personnel de l'hôpital, alors que la ville est privée d'eau, d'électricité et de communications.
Ces nouvelles violences intercommunautaires fragilisent un peu plus le pouvoir de M. Chareh, dans un pays meurtri par près de 14 ans de guerre civile.
Des affrontements avaient opposé en avril des combattants druzes aux forces de sécurité près de Damas et à Soueida, faisant plus de 100 morts.
En mars, des massacres avaient fait plus de 1.700 morts, essentiellement des membres de la communauté alaouite dont est issu M. Assad, après des affrontements dans l'ouest du pays, selon un bilan de l'OSDH.
Présente principalement à Soueida, la communauté druze de Syrie comptait avant la guerre civile quelque 700.000 personnes. Cette minorité est aussi implantée au Liban et en Israël.