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Vin : La vérité sur le prix des bouteilles de

14 mars 2012 20:04

vin dans les restaurants

Par Bertrand Fraysse
En France, une bouteille se paie en moyenne 4 à 5 fois plus cher chez un restaurateur que son prix de vente chez le producteur. Une culbute sans équivalent en Europe.


Une bouteille de modeste entre-deux-mers, Château La Freynelle 2009, à 30 euros sur la carte du restaurant étoilé d'un grand hôtel de Bordeaux: 5 fois son prix moyen chez les cavistes, près de 10 fois le prix payé au producteur. Un vin de pays d'oc sur une grande table parisienne: 78 euros, environ 7 fois son prix d'achat. Et, dans la plupart des restaurants et brasseries de France, le verre de vin vendu au moins au prix où a été achetée la bouteille.

Un vrai sujet tabou pour les producteurs
Pour beaucoup, consommer du vin au restaurant est devenu un luxe hors de portée. "Franchement, c'est le dernier endroit où j'irais boire une bonne bouteille, confesse Jacques Berthomeau, consultant et auteur d'un blog renommé qui porte son nom. Trop souvent, dans la restauration française, le vin est à la fois la cinquième roue du carrosse et la vache à lait."

"C'est un scandale, s'insurge Olivier Poels, rédacteur en chef adjoint de La Revue du vin de France. La bouteille est presque toujours facturée au minimum 4 ou 5 fois le prix où elle a été achetée, jusqu'à 7, voire 10 fois dans les établissements les plus prestigieux." Seuls les grands vins échappent plus ou moins à cette règle. "Si le multiple est en moyenne de 4,5 pour une bouteille achetée 7 euros, il est de seulement 2,5 pour une bouteille achetée 25 ou 30 euros", constate François Lejeune, négociant en vins. La raison de cette dégressivité des prix est simple: si les coefficients habituels étaient appliqués aux vins les plus chers, ceux-ci seraient inabordables.

Pour les grands vins aussi, le problème des marges élevées se pose. Les restaurateurs sont obligés de lancer des opérations spéciales, comme celle de "Carte sur table", qui, du 1er au 31 décembre, proposait à prix cassés dix crus classés du Bordelais dans douze restaurants gastronomiques parisiens. Son initiateur, Jean Moueix, directeur général de Videlot (qui possède, entre autres, Château Pétrus), ne souhaite cependant pas s'exprimer sur la question du prix du vin au restaurant. "C'est un sujet tabou", nous explique simplement son attachée de presse. La plupart des vignerons ne tiennent pas à se fâcher avec leurs clients...

Outre-Manche, le coefficient multiplicateur se limite à 2,5

Le prix élevé du vin au restaurant est, hélas, une exception française. "En Angleterre, le coefficient pratiqué sur nos vins est seulement de 2,5", observe Jean-Charles Boisset, vice-président de la maison de négoce du même nom. Olivier Poels confirme: "Allez en Espagne, les prix vous paraîtront hallucinants. Même dans un restaurant étoilé comme le Can Roca, à Gérone, les coefficients se situent entre 2 et 3. Et en Italie, c'est la même chose: dans le Piémont, vous paierez votre bouteille de barolo 3 ou 4 fois moins cher qu'à Paris. Alors qu'en Bourgogne, à de rares exceptions près, vous vous ferez massacrer."

En pratiquant des prix raisonnables, les restaurateurs espagnols et italiens savent faire la promotion de leur production locale. A l'inverse, en vendant leurs vins à prix d'or, les restaurateurs français ne frustrent pas seulement les amateurs. Ils déçoivent aussi les touristes, provoquant du coup un manque à gagner pour la balance commerciale de la France, première destination touristique et premier pays producteur de vin au monde.

Comment les Français justifient cette culbute

Selon la plupart des restaurateurs interrogés, les marges pratiquées ailleurs seraient impossibles dans notre pays. "Les charges salariales sont trop fortes. Je ne suis pas sûr qu'elles soient les mêmes en Espagne", assure Olivier Mayeras, patron du restaurant parisien La Gitane. "En France, les charges de personnel nous plombent. Ce sont les plus élevées d'Europe", confirme Jean-Louis Leimbacher, directeur général à l'Hôtel du Palais, à Biarritz. Ce dernier arrive pourtant à proposer de bonnes bouteilles à des prix raisonnables, même dans son restaurant étoilé Villa Eugénie, où la carte des vins commence à 35 euros, avec des coefficients allant de 2 pour les très grands crus à 3,5 pour les bouteilles les plus modestes. "J'ai une clientèle d'habitués qui restent parfois un mois à l'hôtel, dit-il. Si je veux les fidéliser, je me dois de leur proposer aussi des vins accessibles."

Autre argument invoqué par les restaurateurs: le coût du service. "Stocker les vins, les mettre dans des verres adaptés, employer un personnel compétent, tout cela coûte cher", souligne Philippe Faure-Brac, ancien meilleur sommelier du monde et patron du Bistrot du sommelier, à Paris. "Il faut aussi prendre en compte toutes les bouteilles qui sont refusées, soit parce que le vin est prématurément oxydé ou bouchonné, ce qui arrive de plus en plus souvent, soit parce qu'il ne correspond pas au goût du consommateur", renchérit Robert Vifian, directeur et sommelier du restaurant vietnamien Tan Dinh, à Paris.

Si cette explication est peut-être valable pour les établissements qui, comme Tan Dinh, possèdent une cave de plus de 30.000 bouteilles, elle est globalement insatisfaisante. "La plupart des restaurateurs fonctionnent presque à flux tendu avec un stock minimal qui ne leur coûte pas grand-chose", observe Jacques Berthomeau.

Les cavistes n'hésitent plus à concurrencer les restaurateurs

"Les prix élevés du vin sont la conséquence d'une tradition plus que d'un calcul rationnel, résume Philippe Bourguignon, directeur général et chef sommelier du Laurent, célèbre restaurant parisien qui possède une cave de 20.000 bouteilles. Si l'on a la chance d'être acheteur en ligne directe chez de bons vignerons, on ne paie pas les vins très cher et on peut les revendre à des prix raisonnables. Mais la plupart des restaurateurs hésitent à faire des marges plus élevées sur leur cuisine et préfèrent se dire: on se rattrapera sur les vins."

Du coup, ces restaurateurs risquent de voir leurs clients amateurs de vin partir ailleurs, chez les cavistes notamment. Avec ou sans droit de bouchon, ces derniers proposent de plus en plus souvent à leurs clients de déguster leurs vins sur place en accompagnement d'une restauration simple, à des prix qui sont ceux de la vente à emporter, soit un coefficient rarement supérieur à 2. Mais la cuisine qui y est proposée est bien loin d'être gastronomique. Bien boire ou bien manger: en France, il faut choisir.

2 réponses

  • 04 décembre 2013 16:40

    Certains restaurateurs acceptent un "Droit de bouchon". Quand vous réservez, demandez si c'est possible. Bien sûr , ne faites pas l'injure d'aller dans un "bon" restaurant avec une bouteille a deux sous.
    Je suis allé dans un restaurant étoilé qui , à ma grande surprise , a accepté que j'amène un Cos d'Estournel 1989 que j'ai proposé au chef et au serveur, qui ont refusé.
    A la fin du repas - parfait - j'ai' remercié le chef et lui ai posé la question de savoir pourquoi il acceptait cette possibilité. Sa réponse: "Peu de nos clients demandent d'apporter leur bouteille. Quand ils en apporte une , habituellement ce sont de grands vins. Cela m'a permis un jour de goûter à une ROMANEE CONTI".


  • 29 juin 2014 07:51

    "Il faut aussi prendre en compte toutes les bouteilles qui sont refusées, soit parce que le vin est prématurément oxydé ou bouchonné, ce qui arrive de plus en plus souvent, <== Comment un professionnel peut-il proférer une telle absurdité?


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