Pascal Pessiot / le 02 Novembre 2007
« «Le marché du jeu de casino en ligne représenterait entre 5 et 10 milliards d'euros» »
1) Quelques commentaires sur vos résultats ?
Nos résultats sont très nettement en hausse. La société a enregistré un chiffre daffaires de 12,9 M � sur les neufs premiers mois de lexercice 2006/2007, contre 11,4 M� sur la même période de lexercice précédent, soit une croissance de 10,5%.
La fréquentation a progressé de 10 % à périmètre comparable.
Elle sexplique par la communication que nous avons mis en place pour faire connaître nos établissements et par une évolution importante des parcs à machines à sous.
La nouvelle obligation du contrôle aux entrées a été appliquée sans grande difficulté. Nous nétions pas défavorables à ce contrôle dès le départ, notamment parce quil existe dans la plupart des pays développés, en Angleterre par exemple où un délai de réflexion d'au moins 24h est exigé.
En France, le contrôle est moins contraignant. Il concerne les mineurs et les personnes interdites de jeux.
Nous avons mis en place un contrôle en amont par la délivrance de cartes VIP aux clients fidèles. Cest pourquoi, nous navons pas eu de perte de chiffre daffaires jusquà cet été.
2) Vous mettez en avant les opportunités liées aux nouvelles réglementations pour le développement de vos activités. A quelles réglementations et à quelles opportunités faites-vous allusion ?
Il faut distinguer deux types de réglementation. La première réglementation, pratiquement en vigueur, a visé à apporter certains assouplissements dans la réglementation des casinos actuels. Par exemple, il est désormais possible de réunir dans la même salle des jeux traditionnels et des machines à sous et de mettre des billets dans les machines à sous.
Par ailleurs, une autre réglementation concerne les casinos virtuels. Nous travaillons dessus depuis des années. Nous sommes prêts à exploiter un casino sur Internet si demain une autorisation nous était délivrée.
En lespace de trois semaines, nous pourrions mettre en place un système fiable assurant un contrôle des identités et un contrôle du blanchiment de capitaux.
Les autorisations ministérielles sont attendues pour la fin de lannée 2008 et peut-être avant si les instances européennes mettent la pression sur la France.
La situation dans laquelle nous exerçons nos activités est actuellement intolérable. Les professionnels qui sont prêts à travailler sérieusement - en assurant une protection des joueurs et en payant des taxes - sont piratés par des étrangers qui ne paient aucun impôt (ni charges dexploitation pour lorganisation des courses de chevaux) et sur lesquels aucun contrôle nest exercé.
3) Quel est le manque à gagner dû à une telle situation ?
Raisonnablement, je pense que si nous considérons les enjeux dans les casinos en dur qui représentent 10 milliards deuros environ en Europe, je suis persuadé que les jeux de casino en ligne représenteront 50 à 100% de cette somme. Ce qui signifie des pertes entre 5 à 10 milliards deuros.
Pour les État et les professionnels des sports objets des paris, mêmes avec des prélèvements plus raisonnables que ceux sur les casinos en dur français, cela représente une perte sèche de 2,5 milliards à 5 milliards deuros. Cest énorme !
4) La possibilité de mettre en ligne des casinos vous permettrait-elle datteindre des clients étrangers ?
Cest le principe même dInternet où le marché est mondial. De la même façon quon ne peut pas aujourdhui empêcher les sites étrangers dopérer sur notre territoire, demain lorsque la France laura autorisé sur son territoire les opérateurs français souvriront dabord à lEurope puis au monde entier (Chine, Inde, Etats-Unis...).
La France est un pays traditionnel de jeu. Nous avons un véritable savoir-faire que nont pas dautres opérateurs. Je pense quil serait tout à fait envisageable de pénétrer ces grands marchés.
5) Avez-vous réalisé des études dans le but destimer le potentiel de ce marché du casino en ligne ?
Nous avons en effet effectué des études mais une évaluation sérieuse et pertinente est très difficile.
Nos analyses ont été réalisées par référence à de grands acteurs. Nous nous sommes appuyés sur la publication de leurs parts de marché. Mais au final, il est difficile de dire avec précision combien représentent les cibles ou les gains réalisés dans ce segment.
Cependant, je suis persuadé quun site français peut et doit faire au moins 6 million de PBJ (produit brut des jeux, ndlr) la première année de mise en ligne (soit 500 000 euros par mois , moins que les 2/3 des casinos français), plus de 30 millions après 2 ans et sûrement plus de 100 millions avant 5 ans.
6) Quen est-il du contrôle sur Internet ?
Nous avons beaucoup réfléchi à la question. Nous en avons conclu quil était tout à fait possible de sécuriser les opérations et de déterminer clairement qui était en ligne par les codes IP des ordinateurs, la remise des pièces didentité, la délivrance des codes de cartes de crédit.
Avec ces codes, il nous sera possible de connaître le profil de la personne en face, son âge, son pays dorigine, ses revenus. Il sera alors possible de repérer les mineurs, et les interdits de jeu qui sont listés.
De plus, pour la traçabilité des transactions et la protection des joueurs addictés, tous les retraits sur les cartes de paiement ou de crédit seront des «quasi cash» assimilés à des retraits en espèce dans les distributeurs de billets. Autrement dit, il ne sera possible à lopérateur que de retirer léquivalent du cash disponible sur son compte en banque.
Par rapport au blanchiment dargent, nous refuserons de créditer un autre compte que celui dont sera débité largent , il est aussi possible de recréditer la carte bancaire qui a servi au enjeux
7) La Société française de casinos a obtenu lautorisation dexploiter le Holdem Poker dans ses casinos de Gruissan et Châtel Guyon. Pouvez-vous nous en parler ?
Le tournoi à Gruissan aura lieu dans environ 15 jours. Nous avons sollicité les joueurs potentiels. Nous avons enregistré des inscriptions avec des mises minimales de 100 �. Nous avons alors confondu le montant de linscription avec le montant de la mise.
Nous espérons réunir pendant ces deux jours de tournoi près de 250 personnes. Quelques jours après lannonce de ce tournois, nous avons enregistré 120 à 130 joueurs.
8) Quen est-il de la rentabilité de lopération ?
La rentabilité directe est quasiment nulle. Nous ne cherchons pas à gagner de largent avec ce tournoi mais davantage à augmenter le trafic. Cest en quelque sorte une opération de marketing.
9) Quels sont vos objectifs de résultats pour la fin de lannée et pour 2008 ?
Pour 2007 nous avons tablé sur une croissance de 7% de chiffre daffaires annuel ( nous sommes en avance ), un résultat opérationnel positif ainsi quune réduction sensible des pertes (l'activité la Tête dans les Nuages a toujours été déficitaire jusqu'alors).
Pour lannée 2008, nous comptons sur le développement dautres projets comme lextension de nos casinos en dur. Nous envisageons le rachat dun casino très prochainement.
10) Un dernier mot pour vos actionnaires ?
Après cette année de transition nous allons pouvoir nous consacrer à nos exploitations.
Par ailleurs, je crois beaucoup à Internet. Lenjeu sera une croissance importante de lactivité. Les casinos en dur existeront toujours, mais peut-être seront-t-il plus spécialisés (plus de tables et de tournois, plus de spectacles de restauration...).
Internet offre une souplesse notamment dans le budget des joueurs (il nont pas les frais de transport et peuvent soffrir une petite récréation avec 3, 5 ou 10 euros). Un petit spot de plaisirs au milieu de la journée!
Internet sera ce que la télévision est au cinéma. Il apportera le jeu à la maison, mais aller au casino constituera toujours, comme daller au cinéma, une sortie complète autrement plus satisfaisante.
Il nous appartiendra alors de contrôler les dérives de ce nouveau mode de consommation du jeu, ce qui est possible et ce que nous voulons faire afin de pérenniser cette activité.
Internet va ouvrir une nouvelle ère pour les casinos français, un peu comme larrivée des machines à sous au début des années 90, mais en 10 fois plus grand.
Propos recueillis par Imen Hazgui