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Quand l'armée française devient centre d'insertion sociale
information fournie par Reuters01/06/2016 à 23:39

L'ARMÉE FRANÇAISE S’ESSAIE À L'INSERTION SOCIALE

L'ARMÉE FRANÇAISE S’ESSAIE À L'INSERTION SOCIALE

par Simon Carraud

BRETIGNY-SUR-ORGE, Essonne (Reuters) - Romain a vu en l'armée française sa "dernière chance", celle qui lui a permis de reprendre pied après des années d'errance et un baccalauréat professionnel avorté.

A 22 ans, il a intégré en novembre dernier la première promotion du service militaire volontaire, un dispositif expérimental voulu par François Hollande après les attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et une supérette casher.

Il s'agit, selon les voeux du chef de l'Etat, de trouver une place à de jeunes adultes persuadés de ne pas en avoir et, ce faisant, de renforcer la cohésion sociale dans un pays où le chômage touche environ un quart des moins de 25 ans.

En compagnie d'une centaine de stagiaires sans emploi et pour la plupart sans qualification, Romain vient de passer plusieurs mois en uniforme, sur une base de l'armée de l'air en Essonne, au milieu de soldats revenus d'Afghanistan ou du Mali.

"Ils m'ont encadré, appris l'entraide, à avoir confiance en moi", dit le jeune homme, à qui Disneyland vient de proposer un contrat de cuisinier.

Ce service nouvelle manière n'annonce pas un rétablissement de l'engagement obligatoire aboli en 1996 par Jacques Chirac et ne sert pas non plus de voie d'entrée dans l'armée.

43% SANS DIPLÔME

La mission: donner à des hommes et des femmes de 18 à 25 ans le sens de la discipline, les remettre à niveau sur le plan scolaire, leur dispenser une formation professionnelle en partenariat avec des entreprises. Et leur enseigner les rudiments d'une vie d'adulte autonome.

"Certains n'étaient pas allés voir un médecin ou un dentiste depuis très longtemps", explique le général Vianney Pillet, qui supervise le projet.

Parmi les stagiaires du centre de Brétigny-sur-Orge, 43% sont arrivés sans diplôme, 18% avec un simple certificat obtenu en cinquième ou un brevet des collèges - seuls 14% d'entre eux avaient décroché un baccalauréat.

"On leur donne des codes, on leur apprend à s'habiller pour un entretien d'embauche, à se lever tôt, la politesse", selon lieutenant-colonel Gueguen, qui dirige le centre situé à la frontière entre les versants urbain et rural de l'Ile-de-France.

A leur arrivée, les stagiaires ont suivi pendant quatre mois un entraînement à la discipline militaire, des cours intensifs de secourisme ou de conduite, puis une formation professionnelle longue de deux à six mois en fonction de la filière choisie.

Romain a opté pour la cuisine - l'héritage d'un grand-père chef-cuistot -, d'autres ont préféré la SNCF ou les métiers du bâtiment et de l'artisanat, comme Noémie qui avait jusque-là multiplié les "boulots vite fait".

Tous ont désormais l'espoir de trouver à la sortie un emploi stable.

Lorsqu'on demande aux soldats improvisés formateurs si l'armée est bien le lieu pour faire de l'insertion sociale, ils disent faire leur métier - remplir les missions venues d'en haut et servir leur pays, avec ou sans armes à la main.

BUDGET À LA CHARGE DE LA DÉFENSE

"Dans les régiments, nos jeunes soldats sont les mêmes qu'ici. Notre métier consiste de toute façon à les former, à les côtoyer au quotidien, à les aider à régler leurs problèmes", selon le chef de bataillon Eric, directeur de la formation.

Mais "il faut être davantage pédagogue et patient", nuance l'adjudant Ahmed, qui chaperonne environ 25 jeunes majeurs - en langage militaire, on dit qu'il est chef de section.

L'expérience, censée s'étaler sur deux ans, coûte 40 millions d'euros pour 1.000 volontaires. Un budget entièrement pris en charge par le ministère de la Défense, lequel doit déjà financer des guerres à l'étranger et le déploiement de 10.000 soldats en France dans le cadre de l'opération Sentinelle.

Se pose désormais la question de la prolonger et, le cas échéant, de construire de nouveaux centres, en plus des trois déjà ouverts, à Brétigny-sur-Orge, Montigny-lès-Metz (Moselle) et La Rochelle (Charente-Maritime).

Un bilan doit être fait en décembre prochain, à l'occasion d'un rapport remis au Parlement.

Selon un rapport d'information rédigé fin 2015 par des députés, le service militaire volontaire coûterait 600 millions d'euros pour près de 16.000 volontaires, s'il devait être pérennisé et étendu aux 13 régions métropolitaines.

Pour Noémie, 25 ans, l'expérience servira dans la vie d'après, quel que soit le sort réservé au service volontaire.

"J'étais impulsive. Maintenant, je sais me canaliser, mieux gérer mon stress. Je m'énerve moins vite. Et même dans le civil, on reçoit des ordres."

(Simon Carraud, édité par Yves Clarisse)

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