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L'interview d'Elie Cohen (CNRS) : « Il ne faut pas se focaliser uniquement sur la nationalité des acquéreurs »
information fournie par Boursorama29/04/2014 à 14:00

Le démantèlement d'Alstom illustre les effets combinés du déclin industriel de notre pays et de la sous-capitalisation chronique des grands fleurons industriels estime Elie Cohen.

Le démantèlement d'Alstom illustre les effets combinés du déclin industriel de notre pays et de la sous-capitalisation chronique des grands fleurons industriels estime Elie Cohen.

Si Siemens veut prendre le contrôle de l’activité énergie d’Alstom, le groupe allemand doit lancer une offre plus attractive que celle de General Electric. Le critère de la nationalité ne sera pas suffisant estime Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS.

Au stade actuel, quelle serait la meilleure issue industrielle pour Alstom dont le démantèlement paraît désormais inéluctable ? Un rapprochement avec General Electric ou avec Siemens ?

Elie Cohen : Pour le moment, les offres sont difficilement comparables. Seul General Electric proposerait une acquisition des activités d’énergie d’Alstom en cash en proposant environ 10 milliards d’euros alors que Siemens proposerait de reprendre les activités d’énergie d’Alstom en cédant au groupe français une partie de ses activités de transport dans l’idée de créer deux groupes mondiaux, l’un autour de l’énergie, l’autre autour du transport ferroviaire. Dans la mesure où l’on ne connaît pas encore les modalités financière précises des deux offres, la comparaison est difficile. Accorder un avantage à Siemens du fait de sa qualité d’acteur européen ne tient pas selon moi…

Pourquoi ? Ne serait-ce pas l’occasion unique de créer deux « Airbus » européens, l’un dans le domaine de l’énergie et l’autre dans celui du transport ferroviaire ?

E.C : Ce ne seront pas des champions européens car Siemens se verrait renforcé des activités énergétiques d’Alstom et Alstom des activités ferroviaires de Siemens. Au final, vous aurez deux champions nationaux, l’un français, l’autre allemand mais non deux groupes européens. La comparaison avec Airbus ne tient pas. Je rappellerais que l’avionneur européen est issu d’une alliance paritaire, pour des raisons politiques, entre des activités allemandes et françaises. Nous ne sommes pas dans cette configuration.

Certes mais le centre de décision de Siemens resterait en Europe, pas outre-Atlantique ?

E.C : Il est curieux de constater que la flamme européenne de Siemens se réveille seulement à la suite de la proposition de General Electric. En 2003, quand Alstom était au bord du gouffre, le groupe allemand avait développé une stratégie particulièrement agressive vis-à-vis de son concurrent français, en faisant son possible pour empêcher le sauvetage d’Alstom auprès des institutions européennes. Et depuis dix ans, Siemens n’a rien fait pour tenter de construire ce champion européen de l’énergie qu’il appellerait désormais de ses vœux… Si Siemens veut vraiment l’emporter, le groupe allemand doit clairement mettre sur la table une offre plus intéressante que celle de General Electric.

Que doit faire le gouvernement français ?

E.C : Le gouvernement est dans son rôle en demandant des garanties aux prétendants. Mais  une conclusion logique s’impose : il faudra juger les deux propositions non sur des idées préconçues en terme de nationalité mais sur la base des valorisations proposées et des engagements avancés en terme de localisation des activités, des centres décisionnels et de sauvegarde des emplois.

Depuis le sauvetage de 2003-2004, qu’aurait-il fallu faire ?

E.C : L’idée de Nicolas Sarkozy était de marier Alstom à Areva. L’entrée de Bouygues dans le capital d’Alstom en 2006 ( le groupe de BTP rachète cette année-là la participation de l’Etat d’environ 30% ) s’inscrivait en effet dans un cadre plus large. Après la privatisation d’Areva, Alstom et Areva devaient se rapprocher pour créer un nouveau groupe soutenu par l’actionnaire Bouygues. Mais la constitution de ce meccano industriel a été interrompue quand le même Nicolas Sarkozy a décidé de renoncer à la privatisation d’Areva. On a donné un ballon d’oxygène à Alstom qui a pu profiter de la croissance du marché mondial et du formidable dynamisme des pays émergents mais sans le tirer complètement d’affaire. Fragilisé par la crise de 2008-2009, Alstom reste un groupe trop petit et surtout insuffisamment doté en capital. Bouygues n’avait pas les poches assez profondes pour accompagner le développement d’Alstom.

Le siège de Lafarge devrait déménager à Zurich après la fusion avec le suisse Holcim, Arcelor a été avalé par Mittal en 2006, Pechiney par Alcan en 2003. Alstom s’apprête à être démantelé. La cause de l’industrie française est-elle en danger de mort ?

E.C : Nous subissons actuellement en France les effets combinés du déclin industriel et de l’hostilité à la finance. A force de décrier les grandes entreprises du Cac 40 et l’emprise forcément négative de la finance, nous n’avons rien entrepris pour favoriser l’essor de l’actionnariat individuel. La part des actifs financiers à risque dans le patrimoine des Français reste particulièrement faible. Or, ces grands groupes industriels français manquent cruellement de capitaux. A l’heure où un sursaut national serait indispensable, la conjoncture s’avère défavorable, les finances publiques sont sous contrainte et nous avons à la tête de Bercy un « démondialisateur »… Ce n’est pas la meilleure des combinaisons !

Propos recueillis par Julien Gautier

22 commentaires

  • 30 avril15:49

    Lire l'entretien de P. Kron.Ce gros Enk$lé de Cohen ne connaît rien à l'industrie. Le pb est l'absence de commandes en Europe du fait de la subvention des énergies renouvelables et la concurrence très forte des asiatiques dans les pays émergents. Rien à voir avec un qcqe déclin industriel français.D'ailleurs si Alstom n'était pas appétissant GE n'achèterait pas


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