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Épargne : où trouver du rendement?
information fournie par Le Figaro 16/10/2014 à 17:43

Déflation, taux d'intérêt négatifs… C'est un nouveau langage auquel les épargnants vont devoir s'habituer s'ils veulent comprendre ce qui arrive à leurs placements, et faire les bons choix.

Sans le coup de pouce du gouvernement, qui a voulu préserver un rendement d'au moins 1 %, le Livret A serait tombé à 0,75 % en juillet dernier. Sur les marchés financiers, le taux des emprunts d'Etat français à 10 ans a presque été divisé par deux depuis le mois de janvier. Il est tombé à moins de 1,30 %. C'est avec cette rémunération, pour une décennie, que les investisseurs sur les marchés placent leur argent. Sur un ou deux ans, le rendement d'une obligation ne couvre même plus l'inflation, pourtant tombée à seulement 0,4 % sur un an en France.

L'impact sur les placements des Français n'est pas difficile à imaginer. Certes, les épargnants ont encore la chance de voir l'Etat maintenir artificiellement à des niveaux attrayants la rémunération de certains placements sans risques, comme le plan épargne logement, qui rapporte toujours 2,50 % avant prélèvements sociaux (soit 2,11 % net). Un taux fixé par l'Etat et garanti pour toute la durée du placement. Il y a quelques années, cela semblait peu pour un investissement sur 4 ans minimum en principe. Aujourd'hui, c'est beaucoup et ce placement qui peut recevoir jusqu'à 61.200 € fait désormais fureur auprès des épargnants.

Le livret A ne fait plus concurrence au plan épargne logement

Le plan épargne logement est aujourd'hui presque aussi rentable qu'un contrat d'assurance-vie. L'an dernier, déjà, celle-ci ne rapportait en moyenne que 2,80 % avant prélèvements sociaux et fiscalité (soit 2,36 % une fois déduits 15,5 % de CSG, CRDS…). Cette année, les assureurs ont dû investir, dans de mauvaises conditions - à des taux encore plus bas -, l'argent versé par leurs clients. Cela pèsera sur les rendements des années à venir. Déjà, en 2014, les assureurs ne seront pas incités à se montrer très généreux et à puiser dans leurs réserves. Car le Livret A ne leur fait plus concurrence. Et ils ont beau jeu de rappeler que, comparé à 0,4 % d'inflation, même un rendement inférieur à 3 % est avantageux. Mais les épargnants ne sont pas forcément du même avis. Pour eux, c'est peu pour un placement souvent envisagé sur le long terme, pour la retraite notamment (la durée idéale de placement pour optimiser la fiscalité est de 8 ans). Et ils savent que les chiffres officiels de l'inflation ne reflètent pas totalement la réalité de la hausse du coût de la vie au quotidien (impôts…).

Mais quels autres investissements pourraient laisser espérer plus? Seulement ceux qui comportent plus de risques. Les Français l'ont visiblement compris, car tous les assureurs constatent que leurs clients, même s'ils sont attachés à la sécurité offerte par le fonds en euros de leur assurance-vie, sont de plus en plus nombreux à investir aussi sur les sicav et FCP disponibles dans les contrats. Les investisseurs institutionnels, et leurs armées d'analystes et de conseillers, ont fait la même chose. Ces dernières années, pour trouver coûte que coûte du rendement, ils ont aussi accepté d'investir davantage sur des stratégies de gestion moins prudentes.

Les fonds d'obligations à haut rendement

Les épargnants se sont d'abord rués sur les obligations de sociétés qui ne décrochent pas les meilleures notes auprès des agences de notation. Plus petites ou plus endettées que d'autres, elles semblent moins solides, et paient pour cette raison des intérêts plus élevés quand elles empruntent sur les marchés (4 à 6 % aujourd'hui). Une aubaine pour qui cherche du rendement. De nombreuses sicav permettent d'investir clés en main sur ce marché. Ce sont les fonds d'obligations à haut rendement (high yield, en anglais). Depuis le début de l'année, le meilleur produit de cette catégorie, le fonds Euro Corporate High Yield de Petercam, a gagné 8 %, les fonds de Lazard Frères Gestion (Objectif Capital Fi) et de La Française AM (Libroblig) environ 7 %, celui de Candriam (Bonds Euro High Yield) 5,75 %. Certains fonds de ce genre, investis aux Etats-Unis, où le marché est plus large qu'en Europe, ont même progressé de 10 à 13 %.

Une partie de ces belles performances vient des plus-values générées par la baisse des taux, qui a peu de chances de se reproduire. L'autre est issue des intérêts (coupons) généreux versés par ces titres. Tentant? Oui, mais ces obligations à la mode, ces dernières années (certains fonds ont gagné plus de 30 %, en 2012), sont devenues chères. Depuis quelques mois, le marché est beaucoup plus sélectif, plus volatil, aussi bien en Europe qu'aux Etats-Unis. Mais les gérants ne veulent pas se laisser impressionner. «Le taux de défaillance parmi ces entreprises reste faible. Le marché est sain. De plus, on voit beaucoup de nouvelles entreprises émettre des titres. C'est intéressant pour nous qui pouvons sélectionner les bons dossiers», relève Iain Stealey, gérant en charge des stratégies obligataires diversifiées chez JP Morgan AM.

Des placements risqués

Les gérants comptent sur cette sélection de titres pour doper les performances de ces placements risqués. Le fonds Oyster Flexible Credit, du groupe bancaire suisse SYZ & Co, se fixe par exemple un objectif de performance de 8 % par an, en sélectionnant seulement une quarantaine d'obligations d'entreprises sous-évaluées par le marché, ou dont les agences pourraient revoir la notation à la hausse. Les banques, en particulier, constituent un gisement intéressant, selon le gérant.

Le danger? La Banque centrale américaine a annoncé vouloir remonter ses taux d'intérêt. Or, une hausse des taux se solde toujours par des moins-values sur les obligations. «Mais cette remontée des taux directeurs de la Fed n'aura sans doute pas lieu avant l'été 2015. Et les taux européens, eux, monteront peu, compte tenu de la politique de la Banque centrale européenne», rassure Iain Stealey.

L'autre piste, ce sont bien sûr les placements en actions. Mais après leurs beaux résultats des années passées, les marchés affrontent désormais des vents contraires. Les actions européennes se paient autour de 14 fois les profits. Un juste prix. Les investisseurs s'inquiètent de la faiblesse de l'économie du Vieux Continent, pire que prévue. La déflation menace. De nombreux gérants, comme Barings, sont donc sceptiques sur le potentiel de hausse à venir des marchés européens. Carmignac Gestion a même réduit le poids des actions dans ses portefeuilles.

Conscients du manque d'élan des Bourses européennes, les investisseurs ont plébiscité, cette année, les valeurs de rendement, celles qui versent de beaux dividendes, si possible récurrents, même si souvent, ce ne sont pas celles qui laissent espérer les plus fortes croissances de profits. «Les foncières, les valeurs de santé notamment, offrent encore des rendements attrayants. Mais les choisir, c'est quand même prendre un risque boursier, au moment où les marchés sont chahutés», souligne Bastien Rapoport, gérant chez Montpensier Finance. Certains fonds «haut dividende» offrent cette stratégie clés en main, en sélectionnant les meilleures sociétés généreuses avec leurs actionnaires. Beaucoup ont rapporté 5 à 6 % cette année, comme le fonds European Equity Income de BlackRock, l'Europe Strategic Dividend de JP Morgan AM ou l'European Dividend Fund de Fidelity.

Wall Street à l'épreuve

Certains épargnants pourraient aussi être tentés d'investir hors Europe, aux Etats-Unis par exemple, où l'économie est plus vigoureuse et où la hausse du dollar crée un effet de change très intéressant pour les investisseurs européens. Mais les actions américaines sont plus chères encore (16 fois les profits). Et il n'est pas facile pour les Bourses de monter quand les taux s'apprécient. Wall Street sera donc elle aussi mise à l'épreuve, quand la Banque centrale prendra ce virage. Voilà pourquoi les experts de Barings envisagent, comme de nombreux gérants, de prêter davantage d'attention aux Bourses émergentes. L'Inde, la Chine, le Mexique affichent déjà de nets rebonds. «Le plus important, dans ce monde où les Banques centrales ont décidé de mettre les taux à zéro, est de bien diversifier ses portefeuilles», conseille Bastien Rapoport.

Cette diversification, certains fonds l'offrent clés en main. Les plus connus sont les fonds patrimoniaux, qui ont eu tant de succès ces dernières années. Ils sont plus de 1750 disponibles en France, selon Morningstar. Le plus difficile est donc de choisir le bon, en fonction du risque que l'on accepte de prendre. Certains de ces fonds sont prudents, et ne comportent par exemple pas plus de 30 ou 40 % d'actions. D'autres peuvent y consacrer jusqu'à plus de la moitié de leur portefeuille, ou même au minimum 60 % de leurs avoirs. Enfin, certains n'ont aucune borne et laissent une totale liberté au gérant. Autre différence: la palette des marchés sur lesquels ils peuvent jouer. Certains se cantonnent à l'Europe, pour éviter le risque de change. D'autres vont chercher de la performance ailleurs si besoin, ce qui semble plus intelligent aujourd'hui, où le dollar et certaines devises émergentes s'apprécient.

Mais les performances ne sont pas forcément au rendez-vous. «Les fonds “Europe” qui prennent des risques modérés, par exemple, ont rapporté 5,07 % par an en moyenne alors que notre indice composé à 50 % d'actions et 50 % d'obligations a gagné près de 10 % annuels sur la même période», souligne Thomas Lancereau, directeur de l'analyse des fonds chez Morningstar. Dans la catégorie «Flexible», aucun fonds n'a battu l'indice MSCI World, qui reflète la performance des Bourses mondiales. «La performance moyenne dans cette catégorie est de 3,57 % par an sur 5 ans alors que le MSCI World a bondi de plus de 14 % par an dans ce laps de temps», ajoute Thomas Lancereau. Certes, cette période a été particulièrement propice aux actions (avec le rebond qui a suivi la crise de 2008). Ces fonds patrimoniaux ont aussi peut-être permis à leurs souscripteurs d'amortir certaines turbulences. «Mais même le meilleur fonds de la catégorie “Flexible”, R Valor, de Rothschild & Cie Gestion, a fait un peu moins bien que l'indice, à moins de 14 %», précise l'analyste de Morningstar.

Filets de sécurité

Les sociétés de gestion tentent donc d'innover. Le groupe bancaire SYZ & Co vient par exemple de lancer un fonds géré en fonction des perspectives d'inflation, l'Oyster Multi-Asset Inflation Shield. Le gérant détermine le scénario le plus probable (déflation, remontée de l'inflation…) et choisit librement les actifs susceptibles d'offrir la meilleure performance dans ce cas. «En période de désinflation, il faut privilégier les actions et les obligations, et délaisser l'or, les liquidités, les matières premières», note Fabrizio Quirighetti, responsable de la stratégie d'investissement. Si la déflation s'installait, le fonds se recentrerait sur les obligations et les liquidités. En revanche, si l'inflation repartait, les actions et les matières premières retrouveraient ses faveurs.

Pour certains épargnants, même les fonds pilotés pour s'adapter aux évolutions des marchés semblent trop aventureux. Pour chercher des placements dynamiques, ils ont besoin d'un filet de sécurité. Banquiers et assureurs concoctent pour eux des produits assortis de protection en capital, qui permettent de bénéficier d'un rendement (5 ou 6 %, par exemple) en fonction de l'évolution d'un indice boursier ou d'une partie de la performance de celui-ci. Mais ces produits complexes à décrypter ne sont pas, eux non plus, aussi miraculeux qu'ils le paraissent. Par exemple, Le Conservateur a imaginé un placement baptisé COP Taux, qui doit faire gagner à ses souscripteurs 16 à 19 % si les taux d'intérêt en Europe remontent d'un point, tout en garantissant le capital au terme d'une période de 9 ans si le placement fait des pertes. Mais il est construit sur un indice très peu connu, le CMS 20 (Constat Maturity Swaps 20 ans), et ne tiendra sa promesse que si l'Europe ne s'enfonce pas dans une longue période de taux faibles et de déflation, à la japonaise.

Un nouveau genre d'assurance-vie

Pour convaincre les épargnants de prendre plus de risques en Bourse, le gouvernement a donc décidé de toucher la corde sensible, l'assurance-vie. Il a donné aux assureurs la possibilité de gérer un nouveau genre de fonds en euros, l'Euro-croissance. Allianz, le Crédit agricole, l'Afer, Generali et de nombreux autres assureurs préparent le lancement de ce nouveau fonds qui ne garantira pas le capital du souscripteur à tout moment, mais seulement à une date donnée, au moins 8 ans plus tard. Si l'argent y restera disponible et sera géré par l'assureur, les retraits faits avant le terme pourront se faire à perte, si les marchés ont chuté. En contrepartie de cette moindre sécurité, l'assureur promet de choisir des investissements plus dynamiques, en Bourse notamment, afin d'afficher de meilleurs rendements que les fonds en euros classiques. Mais cette gestion complexe coûte cher. Chez BNP Paribas Cardif, le contrat qui ressemble beaucoup à l'Euro-croissance coûte plus de 1 % de frais de gestion (près du double de ce qui est habituellement prélevé pour un fonds en euros classique). De plus, ces fonds risquent d'être lancés au mauvais moment. Car la Bourse a déjà beaucoup monté. Et les taux d'intérêt des obligations, qui vont malgré tout constituer le socle du placement, battent tous les records de faiblesse.

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