* Après le drapeau, le député attaque le budget de l'Union * "I want my money back", dit-il, imitant Thatcher * La France insoumise parle souverainisme et "Europe des nations" * LFI chasse sur les terres du FN, hors immigration par Elizabeth Pineau PARIS, 26 octobre (Reuters) - Jean-Luc Mélenchon chasse de plus en plus sur les terres souverainistes, en opposition totale à la volonté d'Emmanuel Macron de relancer une construction européenne en crise, au point de faire de l'ombre à un Front national empêtré dans ses hésitations sur la sortie de l'euro. Après avoir exigé le retrait du drapeau européen de l'Assemblée nationale, le leader de La France insoumise a mis en cause les "sommes considérables" versées par Paris au titre de sa contribution au budget de l'Union. Plus de 20 milliards d'euros annuels, a-t-il rappelé le 18 octobre devant la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, soit une contribution nette de six milliards si l'on retire l'argent redistribué, dans le cadre de la Politique agricole commune par exemple. "Nous sacrifions six milliards d'activité du périmètre de l'Etat au profit de je ne sais quel usage nébuleux qui se ferait dans l'Union, peut-être parfois pour aider nos concurrents. Donc j'y suis absolument opposé", a lancé l'ancien ministre. En plein examen du projet de loi de finances, il a même repris à son compte une célèbre formule de la très conservatrice ex-Première ministre britannique Margaret Thatcher : "I want my money back" ("Je veux mon argent"). "Eh bien moi, de même", a dit Jean-Luc Mélenchon. "Je trouve qu'il n'est pas normal que nous fassions cet effort au moment même où nous sommes montrés du doigt pour déficit excessif". SONNETTE D'ALARME A ces attaques s'ajoute un discours souverainiste, un terrain jusqu'ici plutôt occupé par des ex-candidats à l'Elysée comme Nicolas Dupont-Aignan ou Marine Le Pen. "On ne peut pas laisser faire l'Europe en défaisant la France. Mais en s'appuyant sur l'identité républicaine de la France, on peut faire une Europe des nations bien intégrée", plaide Jean-Luc Mélenchon, qui fut huit ans durant député européen, dans un récent entretien au magazine "le 1". Eric Coquerel, député de La France insoumise, évoque, lui, la lutte contre les effets "catastrophiques" de la construction européenne dans sa forme actuelle. "Ce qui se passe en Espagne, en Catalogne, est l'un des effets des politiques d'austérité qui abaissent les consentements nationaux", a-t-il dit à Reuters. "Donc avant qu'il ne soit trop tard, on utilise tous les moyens pour tirer la sonnette d'alarme". "La souveraineté du peuple aujourd'hui, elle se fait dans le cadre premier des Etats nations. Et pour l'instant, il n'y a pas un consentement à l'Europe qui fasse, contrairement à ce que dit Emmanuel Macron, qu'il y aurait une souveraineté européenne supérieure aux souverainetés nationales", a-t-il ajouté. Ces propos prennent du relief dans le contexte de recomposition politique en France, au coeur d'une Europe où nationalisme et souverainisme refont surface. "Jean-Luc Mélenchon oscille entre les deux sens du mot souveraineté, se référant tantôt à la souveraineté nationale, tantôt à la souveraineté du peuple", note Pierre-André Taguieff, philosophe et historien des idées. "Il veut ratisser large et rassembler autour de lui les souverainistes des deux rives, ce en quoi il est proche de la position de Jean-Pierre Chevènement [qui brigua l'Elysée-NDLR] en 2002", a dit à Reuters le politologue, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique. Ce faisant, Jean-Luc Mélenchon creuse son sillon de premier opposant autoproclamé à Emmanuel Macron, qui engrange de son côté les premiers résultats de sa politique volontariste en Europe, avec le récent accord sur les travailleurs détachés. EUROPE SOCIALE Pour Yann Wehrling, porte-parole du MoDem, parti partenaire de l'actuelle majorité française, les arguments "mélenchonistes" rendent nécessaires des avancées sociales en Europe. "Répondre à Jean-Luc Mélenchon revient à progresser sur la question sociale, contre l'idée d'une Europe qui écrase les plus démunis et les plus faibles. Un raccourci épouvantable, mais qui peut avoir de l'écho dans l'opinion", a-t-il dit à Reuters. En cherchant à capter l'électorat europhobe, Jean-Luc Mélenchon chasse sur les terres d'un Front national en perte de vitesse depuis la présidentielle perdue de Marine Le Pen. "On verra", s'est borné à dire, ce mois-ci sur France 2, la présidente du Front national à propos de la question de la sortie de l'euro, qui divise son parti. Pour Pierre-André Taguieff, Jean-Luc Mélenchon a l'avantage d'avoir gardé son attrait à la différence d'une Marine Le Pen "en perte de pouvoir charismatique" et d'un Emmanuel Macron "englué dans la banalité quotidienne du pouvoir". "Il peut séduire au moins une partie de ceux qui ont rallié le Front national, notamment la jeunesse populaire", dit-il avant de rappeler la ligne rouge constituée par le thème de l'immigration, majeur à l'extrême droite. "Pour les frontistes, l'ennemi principal n'est pas l'Europe mais l'immigration et l'islamisme. Jean-Luc Mélenchon ne peut pas se permettre d'aller sur ce terrain-là", dit le chercheur. "Pour élargir son électorat, il faudrait qu'il le fasse, mais ce serait suicidaire". (Edité par Yves Clarisse)
ECLAIRAGE-Mélenchon intensifie son discours anti-européen face à Macron
information fournie par Reuters 26/10/2017 à 10:47
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